Mon Grand Raid des Pyrénées – 120 km (récit par Yann Taverne)

Voici un résumé de mon aventure pyrénéenne de cet fin d’été. Il ne s’agit pas là de triathlon mais de trail.

Cette histoire je l’écris autant pour vous la faire partager que pour m’en rappeler et en garder une trace pour plus tard.

 

L’AVANT COURSE :

C’est après avoir terminé le 80km du GRAND RAID DES PYRENEES ou GRP en aout 2014 (et mettre promis de ne jamais recommencer un truc pareil) que je me suis décidé en novembre 2016 à reprendre un dossard pour un trail long…

Pour le coup je m’inscris au TOUR DES CIRQUES, une des épreuves proposée lors de l’organisation du GRP.

Au programme 120km, 7 100m de D+ et 8 200m de D-.

Cette épreuve (si j’en vois le bout) me ferait basculer dans le cercle des ultra-traileurs…

Mon père, toujours motivé pour m’accompagner dans mes délires sportifs, me retrouvera sur les différents Chek Point (CP) pour me soutenir et m’encourager (et j’en ai eu grandement besoin).

C’est donc après plusieurs mois d’un entrainement exigeant (1 500km de course à pied pour 33 000m de dénivelé positif et tout autant de négatif) dont la participation à 5 courses (Marathon de Paris, EUSKAL Trail, Hirukasko, course des refuges, Xibero trail) additionné à une hygiène de vie que je déterminerai comme « adaptée », que je m’apprête à  prendre le départ du TOUR DES CIRQUES.

Au passage je tiens à remercier mes 2 sparrings partners de luxe.

Mathieu ITURRIA avec qui j’ai fait pas mal d’entrainement et avec qui j’ai fait 4 de mes 5 courses d’entrainement.

Nicolas R. (hors AB Tri), coureur d’ultra trail émérite (39h34 à l’UTMB en 2016) avec qui j’ai également partagé pas mal d’entrainements, dont certains dans des conditions proches de celles que j’ai rencontré en course, m’a parfaitement distillé ses conseils.

UN GRAND MERCI A EUX !!!

LA COURSE :

690 concurrents au départ.

Conditions météo parfaites pour un trail : 25° à 9h (juste un peu de vent annoncé sur certains passages de col).

Piau-Engaly le 25 aout 10h… c’est PARTI !!!

Je passe la ligne de départ dans les derniers… Inutile de se presser !!!

Une première boucle de 9km  et presque 800m de D+ dans la station de ski (au premier CP je suis 550ème) et on prend la direction de Gèdre.

Arrivée à Gèdre après 25km de course et 1500m de D+, je suis 408ème, tout va pour le mieux, je suis heureux d’être là.

Je retrouve mon père, je remplis mes bidons et ne traine pas.

La suite, c’est 25km pour 1600m de D+ et on passe notamment par la Hourquette d’Alans, une longue ascension dont on ne voit jamais le bout !

Bon finalement j’en vois le bout et c’est parti pour une longue descente en direction du pied du cirque de Gavarnie (j’y pointe à la 218ème place) et de Gavarnie (221ème position) où m’attend mon père et un gros ravitaillement.

Lors de la descente, petite alerte au talon gauche, je sens une ampoule en formation… Chose qui ne m’arrive jamais ou en tout cas pas aussi tôt !

Je retrouve mon père qui est venu à ma rencontre 2km avant Gavarnie et avec qui je prends plaisir à courir pour rejoindre le ravitaillement.

Une fois arrivé je décide de soigner ma soi-disant ampoule en formation et je vais voir les pompiers.

Ces derniers m’informent qu’ils n’ont pas de pansement adapté et que la seule chose qu’ils peuvent faire c’est de me poser une compresse avec du sparadrap… C’est à ce moment-là qu’un concurrent me propose un pansement COMPEED (merci à lui). Ce même concurrent est en train de s’occuper d’un autre participant qui lui, n’arrive pas à manger et qui est sous l’étroite surveillance des pompiers!

Bref, je repars de Gavarnie (j’en suis à 10h11min de course) direction Gèdre, motivé car je sais qu’on va rentrer dans la nuit et que J’adore ce moment !

Jusqu’à Gèdre… RAS. J’y retrouve mon père, me restaure un peu et repars. Les jambes et le moral sont toujours bons, je suis 169ème !

Le prochain CP sera la base vie de Luz St Sauveur (71km pour 4 200m de D+ de réalisé).

Bon sang !!! On y arrive quand à cette base vie ?

J’avais pas forcément bien analysé le parcours pour y arriver et je me suis fait surprendre par cette portion de 12km et 600m de D+ en pleine nuit et relativement technique (chemin étroit, ligne de vie à tenir, montées et descentes successives)…

J’y arrive enfin… A mon arrivée je suis 166ème.

Mon ami Nicolas R. m’avait clairement conseillé de ne pas rester trop longtemps à la base vie… Lors de mon arrivée je comprends pourquoi !

2h du matin, les concurrents dorment comme ils peuvent là où ils peuvent !

Certains râlent, certains font la queue pour se faire masser et surtout d’autres abandonnent !

Je me mets dans un coin et décide de rester dans ma bulle et surtout de faire vite.

Mon père est là et commence aussi à être fatigué.

Je change uniquement de t-shirt et de chaussures, me restaure rapidement et repars (temps d’arrêt 25 minutes).

A la sortie de la base vie je pointe 126ème, il est 2h37 du matin…

Prochain CP à Barège à 8.5km.

P….. qu’est-ce que je fous là ???

Quand est-ce que qu’on arrive à Barège ?

Par la route il faut 5 minutes bordel… Et là ça fait 1h30 que je marche…

Je savais qu’après Luz St Sauveur une partie difficile m’attendait…

Les 20km qui arrivent nous font faire 2 100m de D+ quasi en continue et en plus sur la seconde partie de la nuit…

J’arrive au CP de Barège (80ème km) il est 4h30 du matin, la fatigue est là, le moral est en berne et mes jambes commencent à plus trop répondre (je suis 125ème).

A ce moment-là ma course aurait pu basculer, d’ailleurs à ce moment-là ma course a basculé…

Je m’assois au bout d’un lit de camp et regarde avec insistance l’oreiller et la couverture qui y sont pliés à l’autre bout en me disant que si je m’allonge et dors un peu personne ne m’en voudra et que même si j’abandonne personne ne m’en voudra non plus…

Mais NON !!! Le 25 aout c’est l’anniversaire de mon fils ainé. Si Je n’ai pas été à ses cotés le jour de ses 8 ans, ce n’est pas pour en plus abandonner… 

Je me lève, plus ou moins en sursaut, et surprends les quelques participants présents.

Je remplis mes bidons et repars gonflé à bloc…

Tellement gonflé qu’au bout de 200m je suis perdu… Plus de balisage !!!

Obligé de revenir sur mes pas et de repasser devant le CP dont j’ai eu tant de mal à m’extraire…

Finalement je retrouve mon chemin mais le moral retombe rapidement… Je sais que là ça grimpe non-stop et en plus c’est raide sur la fin…

Sur le chemin je croise des concurrents exténués en train de dormir recroquevillés sur le bas-côté…

Je vais mettre plus de 2h30 pour faire à peine 7km et monter jusqu’au refuge de la Glère(88ème km et j’y pointe 126ème)… Un long calvaire mais le soleil est en train de se lever et mon moral avec !

Le décor est magnifique et surtout je connais ce qui me reste à parcourir pour m’y être entrainé régulièrement…

Le prochain CP est au lac d’Orédon, mon père m’y attend.

Pour y arriver on fait quasiment 5 km de route en légère descente… Les jambes me reportent sans pour autant pouvoir me faire courir en continu.

J’y suis… 100ème km !

Je me restaure, profite un peu de mon père et surtout lui donne rendez-vous à l’arrivée !!!

Ca va le faire, si je reste concentré et que je ne me blesse pas, ça va le faire !!!

A ce moment là on a fait autant de D+ que de D- (6 300m), ça veut dire qu’il ne me reste plus que 800m de D+ pour 1 900m de D-…

A ce moment-là je ne me doutais pas que la descente, que d’habitude j’adore pour le côté grisant, allait me faire aussi mal…

Le prochain CP est dans 6km. J’y vais sans réfléchir sachant qu’après j’en aurais fini avec le dénivelé positif !

J’arrive au CP Restaurant Merlans en 113ème position, je mange un morceau et file.

Il me reste 14 km de descente non-stop jusqu’à l’arrivée… Mais là les jambes sont trop dures pour courir, je suis obligé de me ralentir en mettant mes bâtons en opposition sur chaque pas et mes pieds me mettent des décharges électriques régulièrement…

Après 12km en 2h35, on arrive sur le bitume et je retrouve mon père venu à ma rencontre pour qu’on finisse la course ensemble.

A cet instant je regarde ma montre qui indique 29h52min27sec !!!

Il me reste 2 000m…

Je dis à mon père : « je vais chercher moins de 30h ! »

Il est presque 16h, et là je retrouve des jambes de feu et commence à courir comme un sauvage… Certes ça ne devait pas ressembler à grand-chose mais je cours !!!

Les émotions me montent, je suis inarrêtable, je vais aller au bout !

Je finis en 29h59min51sec à la 122ème place…

(dont les 2 derniers km en 7min24sec, merci la piste !!!)

On sera finalement 397 à passer la ligne d’arrivée…

Ma performance reste tout à fait relative comparativement à bien d’autres concurrents mais elle est ma fierté !

 

A toutes celles et ceux qui souhaitent se lancer dans cette aventure je vous la conseille vivement même si c’est extrêmement difficile, ça se prépare autant physiquement que techniquement et mentalement.

Il faut en permanence rester humble et surtout douter, ne jamais être trop sûr de soi… Je vous promets que le résultat et le plaisir finals sont inouïs !!!

 

Bonne reprise à tout le monde et vive le sport !!!

 

Avant:

Pendant:

Après

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